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SALAIRES : RETOUR SUR 10 ANS D'APPLICATION DU "RIFSEEP" DANS LES COLLECTIVITÉS

 

Maud Parnaudeau | A la Une RH | France | Toute l'actu RH | Publié le 26/03/2024

Créé par un décret du 20 mai 2014, le régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l’expertise et de l’engagement professionnel (Rifseep) aura bientôt dix ans. L’occasion pour le cabinet KPMG de dresser un bilan de sa mise en œuvre dans la fonction publique territoriale.

Nouvel outil de référence remplaçant la plupart des primes et indemnités préexistantes, le Rifseep devait servir à rationaliser, simplifier et valoriser le régime indemnitaire des agents de l’État et de la territoriale. Qu’en est-il dix ans après ? En s’appuyant sur l’expérience de quelques 80 collectivités accompagnées pour la mise en place de ce nouveau régime indemnitaire (RI), le cabinet KPMG en a dressé un bilan, jeudi 21 mars, lors d’un webinaire.

Les données chiffrées, issues du baromètre HoRHizons 2023, font état d’une proportion de 85 % des collectivités ayant instauré le Rifseep. 42 % l’ont déjà modifié et 24 % envisagent de le faire dans les dix-huit mois. L’enveloppe dédiée au RI a en moyenne progressé de 20 % (entre 2 et 42 %) avec le passage au nouveau système et entre 40 et 95 % des agents ont été augmentés. Quant au contexte de mise en place, l’opération a souvent été menée en corrélation avec le chantier des « 1607 heures », permettant parfois d’en atténuer les effets.

Des comparaisons toujours difficiles

Sur la simplification du paysage indemnitaire, le Rifseep est en théorie plus lisible avec ses deux primes (IFSE et CIA) qui en remplacent une quarantaine. En pratique, les adaptations par filière, les systèmes d’indicateurs, de pondération et de fourchettes ou encore les groupes de fonctions plus ou moins cohérents aboutissent quasiment à « un Rifseep par collectivité ». Ce qui rend les comparaisons difficiles. Dans l’idéal, selon KPMG, il serait bon de prévoir une clause de revoyure pour les critères relatifs aux sujétions et aux métiers en tension, afin de mieux coller à la réalité.

Les analyses des architectures des différents Rifseep ont permis de dégager des « bonnes pratiques », à savoir : « des groupes de fonctions à travailler selon les métiers et non au regard du cadre statutaire », un lien entre « les fourchettes et les capacités financières de la collectivité indépendamment des plafonds », une « logique de sujétions à connecter aux dispositifs de temps de travail pour limiter la double prise en compte et bénéficier d’un dispositif cohérent ».

Des rééquilibrages freinés mais réels

Sur la reconnaissance des fonctions et parcours professionnels, le Rifseep a-t-il permis de rémunérer d’autres critères que le grade, l’ancienneté ou la filière ? Selon KPMG, les objectifs affichés de rééquilibrage entre filières, entre femmes et hommes et entre niveaux de rémunération se sont heurtés à des freins culturels et des limitations statutaires (structuration des groupes de fonctions et des montants plafonds autour des cadres d’emploi).

Sans compter les freins budgétaires. Quand les systèmes de cotation des postes ne se sont pas, tout simplement, transformés en « usine à gaz »… Pour autant, l’harmonisation entre filières et entre femmes et hommes a plutôt bien fonctionné. En revanche, les écarts de rémunération se sont creusés entre petites et grandes collectivités.

Difficile reconnaissance de l’expérience

 

Si quelques collectivités ont réussi à valoriser l’expérience professionnelle, la tâche a souvent été remise à plus tard en raison de la complexité à la fois des critères à déterminer et de la gestion de cette brique complémentaire mais  aussi de la crainte d’une dynamique financière non maitrisable. Concernant les avantages acquis avant 1984 (souvent sous forme de primes annuelles), la plupart des collectivités accompagnées les ont laissés en dehors du Rifseep. Quand cela n’a pas été le cas, ces primes ont été lissées mensuellement ou en une ou deux parts annuelles de l’IFSE.

Sur la valorisation de l’engagement professionnel et de la manière de servir, qui faisait également partie des objectifs visés par le Rifseep, la réforme est un « échec », selon KPMG. Aux délibérations de façade (sans budget dédié) s’ajoutent des dispositifs « fragiles » (critères, montants, process, harmonisation). En cause : des débats de principe sur la rémunération au mérite, des capacités de financement limités et des questionnements sur la capacité des managers à évaluer. Probablement moins d’une collectivité sur trois aurait réellement mis en place le CIA. « Aujourd’hui, le Rifseep doit s’adapter aux évolutions du rapport au travail et à la crise des vocations », préconise le cabinet KPMG.

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